À partir de la saison 2020-2021, l’Opéra national de Lorraine se dote avec le NOX (Nancy Opera Xperience) d’un laboratoire de création lyrique. Son but est de repenser le mode de production d’un opéra en invitant les artistes à travailler à long terme, dans un dialogue intime, en élaborant un spectacle en étroite connexion avec le territoire. Le résultat du NOX est une expérience que nous souhaitons partager avec le public. Pour sa première édition, nous sommes partis d’une question directe que nous avons posée aux habitants de Nancy : “Est-ce que vous êtes amoureux ?”
C’est un opéra qui parle d’amour. Comme beaucoup d’opéras, direz-vous ? Sauf qu’il ne s’agit ni d’une comtesse et de son page, ni d’une cantatrice et d’un peintre, ni d’un séducteur aux mille et trois conquêtes, ni d’aucune autre de ces figures qui occupent habituellement la scène. Les histoires dont il est question ici mettent en jeu des anonymes qui ont pour seul point commun d’habiter la ville de Nancy.
De l’été 2019 à l’hiver 2020, la réalisatrice sonore Chloé Kobuta a arpenté Nancy, recueillant les récits drôles, tristes, tragiques, tendres, passionnés, banals ou extraordinaires de celles et ceux dont elle croisait le chemin : oiseaux de nuit qui hantent les rues de la Vieille-Ville, octogénaires dansant au parc de la Pépinière, chauffeur de taxi naviguant sur les boulevards, vieille dame qui fait ses courses au supermarché ou jeune mère promenant son enfant… Tous se sont confiés à celle qui se qualifie, selon ses propres mots, d’ « ébruiteuse d’histoires ».
Le compositeur Paul Brody a fait de la voix parlée son terrain de jeu. Il s’intéresse à la musique invisible qui se cache sous chacune de nos phrases : cette mélodie intime qui révèle notre état émotionnel, nos origines, nos voyages passés ou notre histoire familiale. Il collabore pour cette création avec les metteurs en scène David Marton et Kevin Barz, dont le travail original s’enracine dans une lecture profonde de la musique.
Un orchestre mobile à géométrie variable accompagne ces histoires qui se jouent aussi bien sur la scène ou le parvis, dans la grande salle, le foyer, les couloirs ou les cages d'escalier du bâtiment. Le spectateur en mouvement est invité à se faire tour à tour témoin, confident ou voyeur des drames secrets de ses semblables. L’opéra devient alors, le temps d’une soirée, pareil à ces places publiques ou stations de métro bondées aux heures de pointe : ces lieux de notre mythologie urbaine où se croisent, chaque jour, sans le savoir, des milliers de destins.